⬛ Gaza juste sous nos yeux
Cette semaine, votre infolettre rend hommage à la journaliste Fatma Hassona : puisse l'écho de son rire hanter ses bourreaux à jamais.

À l'heure où j'écris ces lignes, une commission d'enquête des Nations Unies vient de rendre un verdict accablant et accuse le gouvernement israélien de génocide à l'encontre de la population palestinienne. Ces conclusions s'ajoutent à la pile déjà haute de témoignages de journalistes, de civil·es gazaoui·es et d'organisations non gouvernementales depuis près de deux ans.
En 1970, Gil Scott-Heron écrivait : "the revolution will not be televized". En 2025, malgré le massacre de journalistes et de leurs familles à Gaza, d'innombrables récits glaçants prennent à témoin le monde entier. Qui d'entre nous n'a jamais eu les larmes aux yeux face à ces images d'enfants mutilé·es par les bombes, n'a jamais éprouvé de rage face à l'inaction de notre propre gouvernement ou n'a jamais frissonné à la lecture d'une déclaration de Bezalel Smotrich ?
Toutes ces horreurs sont juste sous nos yeux, chaque jour qui passe, pour peu que l'on prenne un peu la peine de sortir la tête du sable médiatique que continuent inlassablement de pelleter les soutiens de plus en plus rares d'Israël. Alors certes, la révolution ne sera peut-être pas télévisée, mais le génocide est quant à lui bel et bien partagé en direct sur nos réseaux sociaux, souvent au prix du sang.
Ce sang, c'est celui de martyr·es comme Fatma Hassona, une journaliste assassinée en avril dernier pour avoir osé documenter l'enfer de Gaza. Pendant un an, elle a discuté avec la réalisatrice iranienne Sepideh Farsi et a témoigné de son quotidien en vidéo. Elle faisait contre mauvaise fortune bon cœur et affichait un sourire que même les bombardements quotidiens ne semblaient pouvoir effacer.
De cet échange est né le film Put Your Soul on Your Hand and Walk qui sort mercredi au cinéma. Fatma et neuf membres de sa famille ont été tué·es un mois avant que le documentaire ne soit projeté au Festival de Cannes. Cette semaine, votre infolettre lui rend hommage : puisse l'écho de son rire hanter ses bourreaux pour l'éternité et ouvrir les yeux de nos dirigeante·s avant que nous ne plongions définitivement dans l'abîme.
🗓️ PLANNING CLAIR POUR SALLES OBSCURES
Votre rubrique dédiée aux sorties de la semaine (la semaine qui arrive, mercredi qui vient là, ce mercredi, dans un cinéma près de chez vous !)

Que sa joie demeure - Je vous en parlais juste au-dessus, c'est assurément la sortie de la semaine : Put Your Soul on Your Hand and Walk de Sepideh Farsi chronique le quotidien des habitant·es de Gaza sous les bombes israéliennes. J'allais vous conseiller d'assister à l'avant-première en présence de la réalisatrice, mais la séance parisienne est d'ores et déjà complète. Espérons que cela présage d'un grand succès en salle pour ce documentaire qui a déjà fait un passage plus que remarqué au Festival de Cannes au printemps dernier.

Mes cheveux bleus, y a vingt ans que j'les porte - Après les chansons, les peluches, les jeux vidéo, et une montagne de produits dérivés en tous genres, la célèbre chanteuse virtuelle Hatsune Miku s'apprête à conquérir un tout nouveau marché. Croyez le ou non, Colorful Stage! The Movie: A Miku Who Can't Sing est le tout premier film adapté de ce personnage aux cheveux bleus popularisé par la série des Vocaloid il y a presque vingt ans. Dans ce nouveau film, Miku est bien embêtée car elle n'arrive pas à chanter : s'ensuit un récit initiatique au terme duquel elle devra retrouver sa voix avec l'aide de ses ami·es.

Straight Outta Mumbai - À peine remis·es du premier volet de Hari Hara Veera Mallu, les fans de Pawan Kalyan vont à nouveau pouvoir se ruer en salle pour son nouveau film : They Call Him OG. Dans ce thriller, un gangster impitoyable revient à Mumbai après dix ans d'absence et affronte de redoutables barons du crime dans une croisade vengeresse. Rien de nouveau sous le soleil, mais la bande-annonce promet déjà son pesant de castagne. Reste à voir si le montage final aura permis de pallier les nombreux aléas du tournage, victime de la campagne électorale menée au même moment par la star du film.
🏆 L'APPLAUDIMÈTRE
Toute l'actu des festivals de cinéma, petits et grands, avec un minutage extrêmement précis des standing ovations (non)

Elsass, l'Extrême Orient - Le Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg (FEFFS, c'est pas facile à dire) est de retour pour une dix-huitième édition, du 26 septembre au 5 octobre. Cette année, la rétrospective principale du festival s'intitule FasciFiction et alerte sur la montée inquiétante des régimes autoritaires partout dans le monde. Il ainsi sera possible d'assister à des séances de Farenheit 451 de François Truffaut ou de Starship Troopers de Paul Verhoeven. Du côté des nouveautés, l'Asie n'est pas en reste puisque les sélections en compétition incluent notamment Noise de Kim Soo-jin, Junk World de Takahide Hori, Zhaza de Darkhan Tulegenov et bien d'autres films que vous laisse découvrir juste ici. Notez par ailleurs que le jury du festival se compose de pas mal de têtes connues comme Stéphane Moïssakis (Capture Mag), Judith Berlanda-Beauvallet (Demoiselles d'Horreur) ou encore Alexandre Aja (Piranha 3D) qui sera par ailleurs l'invité d'honneur de l'édition 2025.

Ça nous change d'Emilia Pérez - Petit à petit, les candidats à l'Oscar du meilleur film international* se dévoilent. Après Left-Handed Girl (Taïwan), En première ligne (Suisse), Fantôme utile (Thaïlande), Le Maître du Kabuki (Japon) et bien d'autres, c'est au tour de l'excellente comédie noire Un simple accident du cinéaste iranien Jafar Panahi de tenter sa chance sous bannière française. Opposé au régime en place dans son pays, le lauréat de la Palme d'or n'avait aucune chance de représenter l'Iran aux Oscars. Heureusement, le film a été coproduit avec des deniers français, ce qui lui permet de tenter l'aventure sous drapeau tricolore. C'est d'ailleurs assez habituel pour le cinéma contestataire iranien : l'an dernier, ce sont Les Graines du figuier sauvage de Mohammad Rasoulof qui avaient battu pavillon allemand. Bienvenue dans le ballet absurde quoique occasionnellement salvateur de l'orientation politique des comités de sélection nationaux.
*Il s'agit d'une catégorie un peu à part qui récompense les films qui ne sont pas tournés aux États-Unis et qui comportent essentiellement des dialogues dans une autre langue que l'anglais. Chaque pays participant soumet un film au comité qui sélectionne ensuite cinq d'entre eux pour qu'ils soient candidatent à l'Oscar.
🙇♀️ PIÉTÉ FILIALE
C'est la rubrique consacrée aux rétrospectives, aux cycles thématiques et aux classiques en tous genres : le cinéma de patrimoine, si vous préférez.

Vague à lame - The Jokers poursuit son exploitation du cinéma de patrimoine japonais en salle avec une nouvelle rétrospective consacrée à Kenji Misumi. Cette fois-ci, ce sont quatre films qui font leur retour au cinéma :
- Zatoichi, le masseur aveugle (1962)
- Tuer (1962)
- Le Sabre (1964)
- La Lame diabolique (1965)

Une fille du Japon se souvient - Le Reflet Medicis conclut sa rétrospective du Festival Kinotayo avec une lecture des Libellules Rouges de Reiko Kruk-Nishioka présentée par l'autrice elle-même, accompagnée d'un orchestre dirigée par la compositrice japonaise Michiru Oshima. Au fil de sa lecture, l'autrice raconte son enfance à Nagasaki pendant la Seconde Guerre mondiale. C'est demain lundi 22 septembre, à 20h15.
📺 WE HAVE FILM AT HOME
C'est ici que vous retrouverez l'actualité des sorties sur les plateformes de VOD et SVOD mais aussi les éditions physiques de vos films préférés, parce que tout le monde ne peut pas aller au cinéma !

Les Triplettes de Pékin - Peking Opera Blues de Tsui Hark est un film un peu à part au sein du catalogue Golden Princess, en ce sens que son casting est en grande partie féminin ; Brigitte Lin, Sally Yeh et Cherie Chung se partagent en effet le haut de l'affiche de cette savoureuse comédie d'action. Vous commencez à connaître la chanson : longtemps invisible en occident pour de vulgaires raisons légales, le film a bénéficié d'une restauration 4K et débarque cette semaine chez Shout! dans une édition pleine à craquer de suppléments en tous genres. Si je vous en parle, c'est aussi parce qu'il est complètement absent du calendrier de sorties de Metropolitan pour la France. Il sera donc peut-être nécessaire de se rabattre sur cette édition américaine. Attention toutefois : les premiers retours sur les sous-titres anglais de la nouvelle édition de City on Fire de Ringo Lam sont loin d'être encourageants. Prudence est mère de sûreté.

Ségrégation insulaire - L'éditeur australien Imprint Films enrichit ce mois-ci son label asiatique d'une édition exclusive de Picture Bride de Kayo Hatta. C'est la première fois que ce film est édité en Blu-ray et il mérite toute votre attention car il raconte un pan méconnu de l'histoire de Hawaï. Tout débute en 1918, à une époque où la ségrégation raciale était encore d'actualité aux États-Unis. Comme beaucoup de travailleurs japonais immigrés sur l'archipel, Matsuji cherche à se marier alors qu'il approche de la quarantaine. Problème : les lois racistes en vigueur à l'époque lui interdisent d'épouser une femme sur place. C'est là qu'interviennent les picture brides : des femmes japonaises d'extraction modeste contraintes d'accepter de se marier avec des hommes sur simple envoi postal d'une photographie. Parmi elles, Riyo va accepter de s'unir avec Matsuji, avant de découvrir sur place que son époux a le double de son âge...
📰 L'EXPRESS DE CHUNGKING
Vous êtes arrivé·e à la fin de la newsletter : bravo ! Je profite de cet ultime espace de parole pour vous conseiller un livre, une vidéo ou un article que j'ai trouvé intéressant·e cette semaine.
Papy fait de la résistance - En attendant la suite de son excellente rétrospective sur David Lynch, je vous propose de découvrir la nouvelle vidéo du camarade Ciné Skope consacrée à un acteur incontournable du cinéma indien : la SUPERSTAR* Rajinikanth, que vous avez peut-être découvert avec le blockbuster Coolie sorti le mois dernier. Si vous vous demandez comment un type peut se retrouver en tête d'affiche d'un film d'action à presque 75 ans, ou si vous souhaitez simplement en apprendre plus sur le cinéma indien de façon générale, vous savez quoi faire.
*Je crois bien que je suis contractuellement obligée de l'écrire en lettres capitales, c'est comme MARVEL et FINAL FANTASY.
🧧 HONGBAO touche à sa fin ! Je vais être pas mal occupée avec mon travail alimentaire les deux semaines qui viennent, alors attendez vous à des infolettres un peu moins chargées que d'ordinaire. Navrée pour ce désagrément, mais c'est la faute du capitalisme, comme tout ce qui cloche en ce bas monde. Prenez soin de vous et à la semaine prochaine !